Comment se fait-il que ce soit si difficile de rester simplement tranquille.
Le chrétien cite volontiers :
Matthieu 6:34 PDV2017 :
« Donc, ne vous faites pas de souci pour demain. Demain se fera du souci pour lui-même. La fatigue d’aujourd’hui suffit pour aujourd’hui ! »
Celui ou celle inspiré(e) par Ramana Maharshi :
« Tout ce qui est destiné à ne pas se produire ne se produira pas, malgré tous vos efforts pour y arriver. Tout ce qui est destiné à se produire se produira, malgré tous vos efforts pour l’éviter. Ceci est une chose certaine.
Ainsi, restez silencieux. »
Ramana Maharshi.
Quant à Nisargadatta Maharaj il se contente de dire
« Si vous pouviez seulement rester tranquilles, vous libérer de vos souvenirs et de vos attentes, vous seriez capables de discerner la beauté des événements. C’est votre agitation qui cause le chaos. »
Ainsi toutes celles et ceux qui se sont éteints en Dieu, le Soi, disent la même chose et vivent la même expérience quelle que soit leur voie ; cependant ils sont rares. La voie ou la religion devient souvent un point de vue en lequel moi trouve une identité vertueuse, persuadé de plus d’être l’heureux élu de la seule vraie voie ou religion. Conséquence, chaque voie devient source de dissentions, parfois même entre les branches différentes d’une même voie ou d’une même religion. Aussi maître Eckhart est-il clair et sans concession lorsqu’il s’adresse à celui ou celle que la spiritualité attire :
« Car quiconque cherche Dieu par une voie particulière obtiendra la voie et perdra Dieu caché dans la voie.
Mais quiconque cherche Dieu sans aucune voie particulière, Le trouve tel qu’Il est réellement…et Il est la vie elle-même. »
Bien sûr de telles paroles peuvent-être mal comprise, car maître Eckhart ne met pas en question la voie ou la religion en soi, mais la source du chercheur ou du croyant. Le Père Le Saux constatait :
« II n’y a pas de place en moi pour Dieu et pour moi à la fois. S’il y a Dieu, je ne suis pas; s‘il y a moi, comment Dieu pourrait-il être? »
À chacun donc d’oser retourner le regard à la source de ce qui le bouge.
Rester tranquille pose la même équation, à chacun à chacune de le vérifier : il n’y a pas de place en moi pour la tranquillité et pour moi à la fois. Soit il y a la tranquillité et moi n’est pas, soit il y a moi et il n’y a pas la tranquillité.
Et en effet, il ne s’agit pas d’un moi tranquille parce-que tout va bien. Il s’agit d’un état sans cause.
Afin que l’homme soit mis au pied du mur, au pied du rêve d’un moi parvenant à je ne sais quoi, Maître Eckhart précise :
« La cause de tes difficultés n’est pas dans les choses, c’est toi-même dans les choses. C’est pourquoi regarde-toi d’abord et quitte-toi. »
Maître Eckhart ou la joie errante. Editions Payot et Rivages
Même son de cloche dans le zen :
« Inutile de chercher à fuir le bruit de l’eau, ou le chant des oiseaux,
Le trouble vient de notre esprit »
Le bol et le bâton
Libre de soi, libre de tout de Shunryu Suzuki
Ainsi tout est clair :
La cause de mes difficultés n’est pas due à ce que je rencontre, c’est moi-même, dans les choses rencontrées, qui est la cause de mes difficultés.
La première des choses est donc de découvrir en moi-même ce que maître Eckhart affirme. Alors le « où » chercher est clair ; effondrement du rêve, contact abrupt avec le réel.
Pour autant « moi » n’est certainement pas l’ennemi à abattre puisque c’est en le connaissant, pas uniquement au niveau psychologique, mais dans son essence même, que la cause de la souffrance et des problèmes est trouvée. Bien sûr, cette démarche est tout sauf agréable. En ce VOIR sans concession, aucun jugement, aucune classification bien/mal ; constat : je suis viscéralement attaché à ce moi, même en le voyant tel qu’il est.
Et là on ne peut plus finasser, rêver. Notre quotidien devient notre gourou. Voir « moi » est une chose, le quitter une autre.
Découverte qu’il n’y a qu’une seule issue : laisser le processus se faire en lui donnant toute mon autorisation et d’instant en instant reconnaître que moi ne donne jamais son autorisation à ce qui le menace. Reste à s’abandonner à « Cela » qui est la source-même du processus.
À voir et à revoir :
Alix Miosho
Dialogues sur un chemin : Comment ce texte résonne-t-il à travers ce que vous vivez aujourd'hui ? Écrivez ci-dessous vos partages et questionnements :